On
entre dans ce livre en douceur. On s’immisce dans la petite vie
tranquille de Mina et Jonathan qui ont fui la ville et les sirènes
de la consommation pour un retour au source plus respectueux de
l’environnement. Ils se contentent de peu et vivent heureux dans un
village quasi-déserté du Berry. Il fait beau, chaud et le temps
s’écoule avec nonchalence. Tout semble parfait. Il l’aime, elle
l’aime et ils aiment leur fils. Ils s’occupent de produire du
miel, des légumes qu’ils mettent en conserve en prévision de
l’hiver.
L’arrivée d’un voisin pourrait être la dernière touche pour parfaire cette vie simple, en atténuant la sensation d’isolement qu’ils peuvent parfois ressentir malgré tout. C’est donc avec plaisir qu’ils accueillent Vladimir lorsque ce dernier frappe à leur porte pour les informer de son emménagement dans une maison isolée, un peu plus bas sur le canal. Il sera leur plus proche voisin.
Mais,
dans la même veine que le film « Harry, un ami qui vous veut
du bien » Vladimir, par son excès de prodigalité instille
progressivement le malaise dans ce couple où pourtant tout semblait
si bien fonctionner. D’abord diffus, il nous saisit comme il saisit
Jonathan, et au fil des pages, il devient de plus en plus pesant. Le
personnage de Vladimir n’est pas sans rappeler le légendaire
Dracula et l’auteur joue avec ce mythe et s’en inspire. Mais ici, ce
démon tentateur n’a pas besoin, pour se nourrir, du sang de ses
victimes et sa séduction ne joue pas que sur son seul aura sexuel. Il tire des ficelles bien plus machiavélique pour conquérir le cœur
de ses victimes. Ce sont d’autres aspirations, d’autres désirs
qui alimentent son pouvoir.
Tandis
que Vladimir s’impose progressivement dans la vie du couple, le
trouble s’instaure et la fêlure se transforme progressivement en
un gouffre vertigineux. L’équilibre de chacun vacille et le
lecteur voit impuissant les protagonistes s’approcher de l’abîme.
J’ai
aimé l’écriture de Bordaçarre qui narre avec une rare finesse le
quotidien et la psychologie de ses personnages. Il se dégage de ce
livre une atmosphère dense et malgré la touffeur de l’air, on se
surprend à frissonner. La chute finale vient parfaire ce livre pour
faire de cette histoire un roman parfaitement abouti.
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