Il est rare que je
peine à lire un livre, que j’ai l’impression d’avoir dans les
mains un pavé que je vais avoir du mal à terminer. Pourquoi en
faire une chronique alors ? Je vous vois déjà près à
reposer le livre sur le rayonnage de la librairie ou de la
bibliothèque en vous disant
-- à quoi bon, si c’est comme ça, c’est pas pour moi » .
-- à quoi bon, si c’est comme ça, c’est pas pour moi » .
-- Pas si vite ! parce que malgré cette peine, je peux vous assurer que ce livre mérite
amplement qu’on fasse cet effort.
Pour l’histoire,
d’abord. L’intrigue du roman bien sûr, mais aussi l’Histoire
avec un grand H. Celle qu’on omet trop souvent dans nos livres
d’histoire, celle des relents nauséabonds de l’après-guerre,
des collabos qui ont su tirer leur épingle du jeu pour mieux tirer
les ficelles d’un microcosme bordelais (mais qu’on imagine
aisément le même dans bien d’autres villes de France) après « la
deuxième guerre mondiale ». Celle d’Algérie, aussi, cette
guerre dont on ose pas parler, car nous n’y avons pas tenu le beau
rôle.
Pour les personnages
ensuite, et surtout. Parce qu’ils sont riches et complexes. Tous
sont dépeints en ombres et lumières, enfin presque tous, car pour
l’inspecteur Darlac, pas facile de trouver même une infime lueur.
Ce livre, si c’est
un peu l’histoire de vengeance, c’est d’abord et surtout
l’histoire d’une guerre qui ne dit pas son nom, une guerre larvée
alors même qu’elle est censée être finie, tandis que s’en
imbrique une autre qui commence à peine. Une qu’on ne voit pas. Car elle se passe là-bas. En Algérie.
C’est un livre
écrit au présent alors même que l’histoire qui nous est narrée
nous emmène près d’un demi-siècle en arrière. Peut-être parce
qu’aujourd’hui encore, même si on ne les voit plus vraiment, les
cicatrices de ces deux guerres sont encore là. Peut-être
aujourd’hui encore, sommes-nous « Après la guerre ».
Alors pourquoi
malgré toutes ses qualités, ai-je tant peiné à lire ce livre ?
Peut-être du fait du poids de cette histoire, la nôtre, ce poids
dont on aimerait se décharger, se dire « pas concernés ».
Peut-être aussi parce que l’écriture, si elle est belle et
qu’elle mêle adroitement langage argotique et langage soutenu, m’a
parfois semblé trop précise, trop descriptive. Là où j’aurai
aimé parfois une toile plus impressionniste, davantage centrée sur
l’émotion, l’auteur a choisi quant à lui le registre du
réalisme. Rigoureux dans ses descriptions, très attentif aux
détails, ajoutant souvent nombre d’adjectifs qualificatifs pour
renforcer l’image qu’il souhaite nous transmettre. Cela contribue
certainement à renforcer encore le poids de toute cette noirceur,
mais, personnellement, cela m’a parfois éloignée du récit.
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