Entre minuit et cinq heures du matin,
sur le boulevard Périphérique, on peut voir passer une GSX-R
Hayabusa de 1300 centimètres cubes qui roule à près de 250
kilomètres/heure.
En vitesse de pointe, l’Hayabusa
atteint les 300 kilomètres/heure, mais 250 de moyenne, sur 35
bornes, c’est bien déjà.
L’Hayabusa est rare et lorsqu’elle
paraît, ils sont quelques-uns, sur le bas-côté, dans les tours
encrassées qui bordent le boulevard, sous les ponts et dans les
zones herbeuses où dorment quelques clodos bien ivres, ils sont
quelques-uns à dresser l’oreille. C’est un bruit suraigu qui se
lève de très loin, précis jusqu’à l’assourdissement, qui
enfle tandis que des riverains se redressent dans leur lit. Cela dit,
ces derniers ne prennent pas la peine d’aller voir à leur fenêtre.
Ils savent par avance que l’Hayabusa sera loin avant qu’ils ne
soient parvenus à se lever. Ils se contentent d’écouter cette
vague sourde qui monte, progressive et orageuse, jusqu’au moment où
elle se retourne d’un seul coup pour disparaître dans un
rétrécissement déchirant. Ne reste qu’une impression de doute,
quelque chose comme cet effet qu’on appelle persistance rétinienne
et qui laisse une lueur sous la paupière, une fois que la lumière
s’en est allée.
À cette vitesse, il faut au pilote de
l’Hayabusa entre neuf et dix minutes pour enfermer la ville dans la
ligne continue qu’il dessine avec son corps et sa machine.
L’asphalte est presque désert, il ne change pas de vitesse, son
moteur aspire le carburant comme le siphon d’une baignoire, dix
longues minutes hurlantes, la gomme écrasée sur la surface
granuleuse du bitume.
À cette vitesse, quand le dos arrondi
du pilote devient une pièce de carrosserie parmi d’autres, la
mécanique prend un sens étonnant. Un enfer de métal, d’huile et
de chaleur qui mue l’espace en bruit.
Les habitants ne le voient pas
vraiment. La police n’est jamais parvenue à le prendre. Le pilote
ne vient pas quand elle l’attend. Et puis les caméras sont trop
lentes, les images imprécises. Parfois, il se passe soixante jours
entre deux courses. Et puis l’Hayabusa reparaît, l’aube se lève
et tout à coup, la ville éclate, éventrée par la course absolue
du bolide japonais.
Sur les bords du Périph, il y a des
immeubles couverts de poussière, des fenêtres empoissées de gaz
d’échappement. La télé tourne à longueur de temps, les sommeils
sont discontinus et parfois, on souffre d’inquiétants maux de
tête. On ne vote plus, on gratte des Morpions, des Millionnaires, on
joue au Keno, on fume des pet’ devant sa Playstation, demain n’est
pas un autre jour. Certains restent là toute la journée, le nez
collé à leur fenêtre, à regarder passer les voitures. La banlieue
dégorge en bas de chez eux. La circulation est digestive, encombrée,
ça grogne, ça vibre, ça s’active dans un surplace flou de
chaleur. Alors quand passe l’Hayabusa, c’est comme un printemps.
D’ailleurs, il paraît que le pilote porte une hirondelle, une
silhouette noire sur fond blanc, à l’arrière de son casque.
On ne sait plus qui a raconté ça le
premier.
Le pilote regarde justement cette
silhouette noire sur fond blanc. Son casque est posé sur la desserte
de la cuisine. Il revient à ses œufs au plat qui frémissent dans
la poêle. À la radio, on parle des intempéries, du Jihad et de
Nabila . Le pilote n’écoute pas. Nath est de nuit, elle ne va pas
tarder à rentrer. Il faudra qu’il aille ranger son casque dans le
cellier. Il finit par éteindre la radio et commence à manger ses
œufs directement dans la poêle, debout, son blouson de cuir encore
sur les épaules. Il casse les jaunes avec sa fourchette et enfourne
la nourriture sans prendre la peine de mâcher. Il remet du poivre,
il coupe le blanc, il avale un œuf, puis deux, enfin le troisième,
en épongeant les jaunes avec du pain de mie. Il crevait de faim. Il
éteint finalement la radio pour profiter du bourdonnement qui
persiste dans ses oreilles. En fermant les yeux, il peut même
retrouver les sensations de la route, ce glissement continu,
l’aspiration des passages de vitesses, les à-coups du freinage;
tout cela continue à courir dans ses jambes, ses bras et sa colonne.
Parfois la nuit, éveillé dans son lit, il conduit encore, souriant
dans le noir. Il va falloir oublier tout ça. On sonne à la porte.
C’est peut-être Nath qui a oublié ses clefs. Merde, le moteur est
encore chaud. Il hésite et puis se dépêche d’aller ouvrir, non
sans avoir mis la poêle dans l’évier et sa tasse dans le
lave-vaisselle.
Sur le seuil, il y a un drôle de petit
mec qui l’attend, de la taille d’un jockey. Le pilote cligne des
yeux. Le jour est encore tout neuf, piquant et l’odeur du froid ne
s’est pas encore dissipée. Les volets des voisins sont ouverts et
leurs bagnoles au garage ; bientôt il faudra partir à l’école,
aller au boulot. Le pilote regarde sa montre, il est à peine sept
heures et demie et sur l’herbe récemment plantée de part et
d’autre de l’allée de graviers, on voit briller un reste de
rosée.
Le petit mec a une tête bizarre,
asiatique, ou alors comme ces gamins qui vieillissent à toute
vitesse et sont déjà au bout à quinze piges. Une peau comme de la
cire. Quand il se met à sourire, le pilote sent un frisson lui
passer au travers. Il faut dire aussi que ça caille encore pas mal à
cette heure-là.
— Je suis venu pour la moto.
— Ah bon ?
Le type lui semble drôlement mal fichu
pour une bécane comme l’Hayabusa. 1300 centimètres cubes. Il
le verrait plutôt sur un Chappy.
— Rentrez alors.
Le type le suit jusque dans la cuisine,
où le pilote récupère sa tasse et propose un café à son invité.
— Il est tôt quand même, fait
le pilote, sans agressivité.
Le type ne se formalise pas. Il s’est
déjà juché sur une chaise, sucre son café et sort de sa poche une
cigarette électronique plutôt balaise ; on dirait un
talkie-walkie dans sa main minuscule. C’est alors seulement que le
pilote remarque ses bottes, son blouson, la paire de gants qu’il a
posée sur la toile cirée, tout l’équipement du motard. C’est
vrai qu’il est toujours un peu long à la détente. C’est pour ça
qu’en général, il préfère s’en remettre à Nath pour prendre
des décisions. Il jette un coup d’œil à l’horloge murale, elle
ne devrait plus trop tarder maintenant. Il se demande ce qu’elle va
penser en trouvant ce drôle de petit mec dans sa cuisine, d’autant
que ce dernier s’est mis à tirer sur sa clope sans rien demander.
— Vous pouvez pas fumer ici,
fait le pilote.
— C’est pas vraiment une
cigarette.
Le type sourit de toutes ses dents et
on jurerait Rascar Capac.
— Vous la faites à combien ?
— C’est dit dans l’annonce,
répond le pilote.
— C’est beaucoup.
— C’est une bonne moto.
— Pourquoi vous la vendez ?
Le pilote s’appuie sur le bord de
l’évier en inox et reprend une gorgée de café bien chaud.
— J’en ai pris soin. Elle vaut
10 000 euros, c’est tout.
L’autre plonge la main à l’intérieur
de son blouson et en tire une liasse bien épaisse de billets mauves
et neufs. Il se met à compter et fait une pile sur la table de la
cuisine.
— Voilà. 10 000.
Nouveau sourire. À le voir se marrer,
on comprend tout à coup que les dents et l’os, c’est la même
chose. Son sourire annonce le crâne, il fait penser à l’après,
dans la terre, quand tout est noir.
— Je voudrais bien que vous
répondiez à deux ou trois questions, dit encore le petit mec.
— Allez-y toujours.
L’autre tire alors un nouveau billet
de sa liasse et le tend au pilote qui ne bouge pas. Un pli profond
s’est creusé entre ses sourcils. En même temps, si Nath voyait
tout ce fric, elle lui dirait de ne pas faire sa mauvaise tête, ils
n’ont pas fini de rembourser le canapé. Alors il fait finalement
disparaître le billet dans la poche de son jean. L’homme sourit
toujours. On s’y fait finalement à cette drôle de tête. Comme le
jour de la rentrée à l’école, tout le monde a une gueule
bizarre, on voudrait rentrer chez soi, et puis on s’habitue. À la
fin de la journée, la moitié des mecs de la classe sont devenus vos
copains.
Le pilote et le petit mec se mettent
donc à papoter. Enfin, le type pose des questions, sur la bécane,
si elle est assurée, sa vitesse de pointe, sa consommation, ce genre
de trucs. Pendant ce temps-là, il n’arrête pas de tirer sur sa
clope électronique, si bien que la cuisine commence à s’emplir
d’une curieuse odeur d’alcool de poire. Le pilote répond de son
mieux. Il fait des efforts. Quelque part, il est convaincu qu’il
aura droit à un billet supplémentaire s’il fait exactement
ce qu’on attend de lui.
— Et vous pensez qu’on peut
vous dépasser ?
Le pilote croise les bras sur sa
poitrine. Il n’est pas sûr de bien comprendre.
— Comment ça ?
— Est-ce qu’il existe un moyen
de vous rattraper ?
— Je vois pas ce que vous voulez
dire.
— Sur le Périphérique par
exemple.
Le visage du pilote se fige. Voilà, on
y est, les emmerdes. La première fois qu’il a raconté ses
exploits à Nath, tout de suite elle l’a prévenu. Il faut arrêter,
se débarrasser de la moto, les flics vont finir par te retrouver, il
y aura la justice et alors il faudra vendre la maison. Elle avait
raison et le pilote lui a promis de faire le nécessaire. Ce qu’il
ne lui a pas dit en revanche, c’est qu’il comptait se payer une
dernière virée. Cette nuit, il est monté à 300. Il s’est senti
comme rarement, affuté, balistique. Il ne le regrette pas encore.
C’est le moment que le type choisit
pour sauter de sa chaise et s’avancer vers lui, toujours souriant,
de bonne humeur.
— J’ai cinquante mille balles
pour vous si vous me garantissez qu’on peut aller de la porte
d’Auteuil à la Porte de Bagnolet sans se faire rattraper.
— Rattrapé par qui ?
— Par personne justement.
Le pilote se perd alors dans le vague.
Dans le flou de la vitesse. C’est tentant.
Ensuite, ils sont partis faire un
tour. L’autre voulait savoir ce que le pilote et sa moto avaient
dans le ventre évidemment. Ils sont allés sur les routes de
campagne, le petit mec juché derrière le pilote, sur le siège
passager, à peine plus lourd qu’un sac à dos. Ils ont filé dans
la brume des pâtures, inclinés dans les virages, le sol glissant à
dix centimètres de leurs genoux, puis se redressant pour exploser
vers le point de fuite fixé dans le lointain des lignes droites. Ils
sont arrivés comme ça sur une nationale où la circulation était
pratiquement nulle et le soleil timide. Le pilote lui a montré.
Quand le vent souffle par un soupirail, et qu’une porte claque à
l’étage, on ressent un coup au cœur. C’est exactement ce que le
petit mec a éprouvé pendant un bon quart d’heure, ses bras courts
étreignant le pilote de toutes leurs forces, comme aurait fait un
môme.
À l’arrivée, ils ont encore causé
un petit peu. Le pilote se sentait mieux, pas au point de ne plus se
poser de questions quand même.
— Et si on se fait dépasser ?
— Il vaut mieux éviter.
— Je ne peux pas accepter sans
savoir.
— Si vous pouvez. On vous a vu
rouler. Tout ira bien.
Le pilote commençait à se sentir
obligé. Il n’aimait pas ça. Il fut tenté de couper court, mais
c’est à ce moment-là que Nath sortit sur le perron. Elle était
rentrée depuis un moment et avait pris le temps de se changer. Même
fagotée comme ça, elle avait vraiment quelque chose. Le pilote la
contempla un instant et reconnut cette crispation dans sa silhouette.
Il fallait faire sa vie, avoir une maison, un travail, un jour des
enfants. Des dettes, des amis, rester féminine. Nath se faisait de
la bile.
— C’est rien, c’est pour la
moto, cria le pilote.
— Ah bon. Rentrez alors, vous
devez être gelés.
— Non, Monsieur partait
justement.
Le pilote tendit sa main au petit mec
qui la serra sans se faire prier, la mine toujours aussi réjouie.
C’était réglé. Quand même, le pilote voulut se rassurer sur un
dernier point.
— Et il faudra rentrer dans
Paris ?
— Non non pas du tout.
— Tant mieux. Ça roule mal là
dedans.
— Non servez madame. Je ne bois
pas.
Nath goûte le vin, fait un mouvement
de tête et le serveur lui remplit son verre. Avec tout cet argent,
ils peuvent bien se payer un petit gueuleton pour une fois.
— Merci beaucoup.
Le serveur s’incline, repose la
bouteille et disparaît. Nath a mis ses pendants. Il lui a fallu
quelque chose comme trois quarts d’heure pour se préparer. Elle
lève son verre en souriant. Le pilote aime bien la voir comme ça.
Pour une fois, elle ne s’inquiète de rien.
— À nous.
— À nous.
Le pilote essaie de lui rendre son
sourire, mais ce n’est pas évident. Lui se contente d’eau
gazeuse parce que le lendemain, il a rendez-vous à 6 heures,
Porte d’Auteuil. Ils lui ont dit cent fois que c’était sans
danger. Et puis il a déjà touché le fric. Les autres sont
tellement sûrs d’eux, ils ont trouvé tout naturel de payer
d’avance. Ce qui l’ennuie surtout, c’est de ne rien pouvoir
dire à Nath. D’habitude, le soir après avoir éteint, ils
discutent un petit moment. Mais depuis la visite du petit mec, le
pilote dit qu’il est trop fatigué. Dans son coin, il rumine. En
même temps, il y a le fric.
— Je pensais à un truc, fait
Nath.
— Ouais…
— Dans la chambre, je me dis que
la frise, ça va faire trop chargé.
— Comme tu voudras.
— Je sais plus trop. Après, si
toi tu en as envie…
— Non, pas plus que
ça.
Sans y penser, Nath passe un index
humide sur la lèvre de son verre, ce qui finit par produire un petit
sifflement désagréable. Aussitôt, sa tête s’enfonce dans ses
épaules. Mais personne n’a fait attention. Elle a rougi malgré
tout. Le pilote la regarde, il ne s’en lasse pas. Nath reprend la
parole.
— On avait parlé de passer chez
Saint-Macloux demain.
— Ah oui, mais je dois bosser le
matin.
— C’est pas grave.
— Non c’est bon. Mais
l’après-midi.
Elle pose une main près de la sienne,
sur la nappe blanche. Les lumières sont tamisées et elle n’a pas
voulu mettre ses lunettes. Elle se sent loin, elle n’ose pas trop.
— T’es en colère à cause de
la moto ?
C’est le pilote qui prend sa main
finalement.
— Mais non pas du tout.
Sous la table, Nath s’est déchaussée.
À chaque fois qu’elle met ces talons qui lui ont coûté un bras,
c’est la même histoire. Mais elle se sent jolie lorsqu’elle les
porte.
— Tu en achèteras une autre.
Avec un vrai siège passager.
Elle sourit et le pilote ne sait pas
quoi dire. L’envie de se barrer très loin et de rester là toute
sa vie. Depuis quelque temps, il éprouve tout le temps ce genre de
trucs bizarres. Au moins avec l’Hayabusa, tout était simple.
Le pilote reconnut le petit mec dès
qu’il se fut extirpé de la S80, même s’il portait déjà son
casque et qu’il faisait encore nuit. C’était drôle. Il
s’attendait à une arrivée en trombe, des Gyrophares, des pimpons,
des coups de feu peut-être bien. Il s’était préparé à tout,
sauf à voir cette Volvo massive se garer sur le trottoir, en marche
arrière en plus, et le petit mec en descendre tranquillement pour le
rejoindre, non sans avoir pris le temps de fermer la portière
derrière lui.
— On va partir doucement. Quand
je donnerai le "Go", vous mettrez les gaz.
Le petit mec avait relevé sa visière,
et pour le coup, il ne souriait plus.
— Écoutez j’ai bien réfléchi…
— Mais non, on y va.
Encore une fois, le pilote fut pris
d’une hésitation et puis il tendit la main pour aider le petit mec
à grimper à l’arrière. Alors, il mit le contact et fit chauffer
le moteur en jouant de l’accélérateur, le pot crachant des
cataractes de gaz dans un crépitement de métal mouillé. Et puis il
embraya et ils s’engagèrent comme cela sur le boulevard où la
circulation s’émiettait paresseusement.
Le pilote se laissa porter un moment,
les yeux fixés devant lui. Il soignait sa trajectoire, soucieux, à
l’étroit dans son jean, mal à l’aise. L’Hayabusa glissait. À
l’horizon, des pâleurs rosâtres se détachaient du sol. Le flux
grossissait petit à petit. Il pensa : c’est la dernière fois
que je conduis l’Hayabusa et il eut mal au cœur, comme un môme.
— Maintenant !
Le petit mec venait de crier en se
blottissant dans son dos. Avant d’envoyer la sauce, le pilote jeta
tout de même un coup d’œil par-dessus son épaule. Juste le temps
d’apercevoir un point qui grossissait au loin, comme une balle
sortie de la gueule d’un fusil de précision. C’était parti. Il
mit les gaz, l’aiguille du compte-tour monta aussitôt dans la zone
rouge.
Très vite, ils atteignirent les 250
kilomètres/heure. Les voitures semblaient se volatiliser dans un
souffle à mesure qu’ils les doublaient. Mais dans son rétroviseur,
la forme grossissait toujours. À l’arrière, la présence ramassée
et chaude du petit mec était rassurante. Ils étaient lancés, ils
savaient ce qu’ils avaient à faire. Arriva le tunnel de la Porte
de Vanves. La voûte scandée de lumières blanches et orange
s’emplit du barrissement de l’Hayabusa et tout de suite après,
un second moteur fit entendre son tonnerre réverbéré.
Le pilote décida de changer de file,
déboita sur la gauche au moment précis où un Berlingo mettait son
clignotant et faisait de même. Il fit une embardée, se retrouvant
pris entre la camionnette et une 306. Leur poursuivant avait disparu
du rétroviseur. Il accéléra sur la fine bande de bitume qui filait
entre les deux véhicules, puis se colla à la rambarde à l’extrême
gauche des trois voies et accéléra encore. Quand il déboucha du
tunnel, la route apparut dégagée et son compteur indiquait 290
kilomètres/heure.
Une forme se matérialisa alors à
l’extrémité de son champ de vision, sur la droite. Quelque chose
de noir et trapu. Il rétrograda aussitôt pour retrouver un peu de
couple et de vitesse. Mais les deux motos se tenaient, collées à la
route, prises dans un même élan, exactement parallèles dans leurs
manœuvres. À ce stade, le bruit était tel, la concentration des
pilotes si aiguë, que la vitesse prenait par instant un aspect
d’immobilité et qu’un silence étrange, au second degré,
s’opérait dans leur tête.
Le pilote de l’Hayabusa se mit alors
à respirer la bouche ouverte, comme un cosmonaute dans son casque.
Des coups irréguliers frappaient dans sa poitrine. Il comptait. Plus
que quatre portes. Il fallait tenir. De la buée envahissait sa
visière. Il détourna la tête de quelques degrés pour jeter un œil
à son adversaire. L’autre pilote portait une combinaison assortie
aux couleurs de sa moto. Et derrière lui il y avait une forme. Un
passager apparemment. Difficile d’en être sûr avec ce défilement
incessant de la route et du paysage. Et puis ce côté
disproportionné, à croire que l’autre était vraiment minuscule.
Pas tout à fait la taille d’un nain ; celle d’un jockey
plutôt.
À présent, le soleil avait lavé
le ciel et la route prit une netteté radieuse. Le pilote se déporta
vers l’intérieur. Il savait que de cette manière, il pourrait
gagner quelques mètres sur son poursuivant.
C’était peu, c’était tout ce
qu’il avait.
J'ai beaucoup aimé cette nouvelle, originale, rythmée, bien construite, un brin fantastique. Bon, quelques problèmes de ponctuation (majuscules pas accentuées, manque certaines virgules, tirets de dialogue pas bons), mais je me suis laissé emporté par l'histoire.
RépondreSupprimer11 minutes, 35 kilomètres de périphérique, le Prince Noir avait déjà établi ce record (cette folie ?) en 1989 à 7h du matin... pas sur une Hayabusa, mais bien sur un 1100 GSXR. :) et 9 minutes en 2004 pour Ghost Rider, vers 5h du mat'.
RépondreSupprimerCela dit, j'ai lu avec plaisir. De l'Hayabusa à Saint Maclou (pas de X à Maclou), j'ai embarqué grave. Pour un peu, j'enfilais mon casque. Nickel !
Bon, moi je roule en Big Mono... c'est sûr que ce genre de sensations, je ne les croise qu'au détour d'une lecture... et ben justement, là, je les ai croisées les sensations... J'étais à fond...
RépondreSupprimer